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Page:Duplessis - Aventures mexicaines, 1860.djvu/83

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se tordait de douleur au milieu d’une mare de sang ; c’était notre cocher. Le sénateur Moratin, la bouche contractée, le teint blême, les yeux vitreux, ressemblait à une statue de la peur ; la charmante señora Jesusita, blanche comme Atala dans le tableau de Girodet, levait au ciel ses beaux yeux pleins de larmes. L’expression de crainte motivée et du vertueux désespoir qui s’y lisait me fit mal à voir.

Doña Lucinda Flores, complètement absorbée par le soin de sa toilette, mettait le plus d’ordre possible dans ses rubans et ne semblait pas effrayée le moins du monde.

Quant aux vertueux Camote, il nageait en plein dans ses eaux, et regardait d’un œil de professeur et de critique tout ce qui se passait.

Les salteadores, après nous avoir fait mettre en rang sur une seule ligne, commencèrent tout de suite leur opération. Deux d’entre eux, se détachant du groupe de la cuadrilla qui nous entourait, s’avancèrent vers nous, le premier son chapeau à la main, le second sa carabine épaulée, armée, prête à faire feu. L’opération du reste était des plus simples. Il s’agissait tout bonnement pour nous de retirer de nos poches l’or, l’argent et les bijoux qui pouvaient s’y trouver, puis de jeter le tout dans le chapeau que présentait, le premier saltéador, sauf, en cas de