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Page:Duranty - La Cause du beau Guillaume.djvu/264

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— Tu crois donc à tous ces mensonges ? s’écria Lévise, dont les lèvres frémirent.

— Je crois, dit-il se raidissant contre un remords poignant qui commençait à l’envahir, qu’à présent que tu t’es donné le triomphe de me joindre aux autres, et cela devait tenter un esprit ambitieux, nous pouvons rentrer chacun dans notre sphère…

— Mais tu le crois donc ? s’écria encore Lévise, tu le crois donc ? Voilà plusieurs fois que tu me parles de Guillaume, tu me soupçonnes !

Elle éleva les mains, les joignit, muette supplication. L’horrible chagrin d’être ainsi accusée ne lui laissait plus de paroles.

Louis éprouvait un véritable vertige. Ce qu’il disait le déchirait, il aurait voulu le retenir dans sa bouche. En martyrisant Lévise, il ressentait une torsion aiguë : les mots cruels sortaient de sa poitrine chassés par les spasmes de son cœur qui était trop surchargé. Il avait peur de lui-même et ne pouvait s’arrêter. Son supplice était double. Par cela même qu’il sentait son tort, il s’acharnait à crier, à faire du mal à Lévise pour ne pas souffrir du sien, pour ne pas entendre la voix de son angoisse intérieure qui lui disait : tu commets presque un crime. Il avait peur de s’apercevoir qu’il n’avait pour lui ni raison, ni droit, ni justice. Il entrevoyait le moment où, à ses autres tourments, allait s’ajouter le malheur, le repentir d’avoir été atroce envers Lévise ; cela achevait de mettre sa tête en désordre.

— Ah ! dit-il avec cette méchanceté insensée et maladive qui le possédait et lui ôtait toute liberté, mais quand donc cette comédie sera-t-elle finie ? Si ta patience à la jouer dure encore, la mienne est à bout. Va-t’en. Je veux que tu partes. Tu as fait de moi un misérable débris. Je