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Page:Duranty - La Cause du beau Guillaume.djvu/98

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être se trouvât qui eût des prétentions sur la jeune fille.

— Oh ! répondit Euronique, les gueux vont toujours ensemble. Il sait qu’aucune fille ne voudrait de lui, il n’y a que celle-là de son acabit.

Lévise était donc bien méprisée, qu’on lui associait fatalement un garçon mal vu dans le pays, ou bien Euronique n’était-elle inspirée que par son habituelle méchanceté ? Les tourments du jeune homme augmentaient. Une question grave sortit de ses lèvres :

— Est-ce qu’elle n’a pas « fauté », la Hillegrin, pour avoir une si mauvaise réputation ?

— Il ne lui manquerait plus que ça. Ah bien ! on ne l’aurait pas gardée dans le pays. Elle est bien trop fine ! Avec des paysans, ça serait bien au-dessous d’elle, la mijaurée, elle attend les gens de la ville, ça lui fera plus d’honneur.

Le pauvre Louis était malheureux de cet entretien, mais il y puisait de trop importantes révélations pour ne pas y sacrifier son calme. Il acquérait aussi de cruels doutes dont les épines irritaient son esprit, comme certains breuvages malfaisants irritent la bouche et la sollicitent à boire toujours.

— Vous croyez, demanda-t-il, qu’elle a un plan arrêté ? qu’elle est ambitieuse ?

— Dam, monsieur est heureux d’en être sorti à si bon compte, monsieur en a été quitte pour ses serviettes !

Les vulgaires insultes d’Euronique jetèrent le jeune homme dans la tristesse. Il ne pouvait rien démêler de clair parmi les renseignements de la servante. Se résoudre à voir Lévise sous un mauvais côté lui était impossible. Être sûr d’elle, à présent, il ne le pouvait pas davantage. Ne pas croire que tout ce qu’avait dit Euronique fût faux ou méchamment arrangé, il ne s’y décidait point ; il pen-