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Page:Eekhoud - Les Pittoresques, 1879.djvu/122

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Raymonne


Les cheveux parfumés tombent en boucles blondes
Ayant le chatoiement du soleil sur les ondes.
Au poing droit, sur un gant à Venise brodé,
Où le tissu soyeux finement se marie
Aux filigranes d’or groupés en armoirie,
Il porte son faucon par le doge cédé.

« Toujours mélancolique, Amaury, mon beau sire ? »
Dit une voix timide, et sur son front de cire
Il sent d’un long baiser l’enivrante moiteur.
Il a levé les yeux : c’est Diane, sa femme,
Qui l’aime et qui voudrait rasséréner son âme,
Supporter avec lui des maux la pesanteur.

Mais ses maux ne sont pas de ceux que l’on partage ;
Les êtres innocents ont ce désavantage,
Qui nuit au pur effet de leur heureux pouvoir,
D’ignorer les soucis que l’ambition crée,
Ce qu’une âme devient aux passions livrée,
Ce que dans un cerveau l’on peut broyer de noir.

C’était un idéal lumineux que Diane,
Cœur d’ange dans un corps vaporeux, diaphane,
Dont rien de malfaisant ne pouvait s’exhaler ;