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Page:Eekhoud - Les Pittoresques, 1879.djvu/132

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Raymonne


Les coteaux, entourés de vapeurs floconneuses,
Marquaient leurs renflements sur les plaines poudreuses,
Et le vent du matin chassait vers l’orient
Les ouates qu’il cueillait à la toison de brume
Des forêts ou du chaume où le foyer s’allume,
Pour en former ensuite un nuage fuyant.

Les laboureurs passaient : les faibles, les robustes,
Les jeunes gens dispos et les vieillards augustes,
L’un à ses souvenirs et l’autre plein de vœux,
Ils allaient vers les champs escortant les grands bœufs.

Amaury les voyait marcher d’un pas alerte,
Comme si d’un instant ils redoutaient la perte,
Fredonnant le refrain d’une vieille chanson,
Les bras ballants tenant l’aiguillon ou la gaule.
Amaury se disait qu’une bonne parole
Eût souvent de ces gens éclairci l’horizon.

Mais qu’avait-il été pour ces hommes fidèles ?
Un fléau destructeur, plus dur que vents et grêles.
Quand sa chasse lancée en un train furieux,
Sa meute, ses piqueurs, ses compagnons barbares,
Excités aux accords de sauvages fanfares,