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Page:Eliot - Daniel Deronda vol 2&3.djvu/34

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— Je ne pouvais pas décemment la laisser vivre comme la mère d’un garde-chasse.

— Au moins n’est-il pas mesquin pour ce qui regarde l’argent ! pensa Gwendolen, et maman a eu le meilleur lot de mon mariage.

L’impuissance à laquelle elle se sentait réduite donna une force nouvelle à l’influence que, dès le début, Deronda avait prise sur son esprit. Elle croyait qu’il possédait un moyen inconnu pour la juger.

« Je voudrais qu’il pût savoir tout ce qui me concerne sans le lui dire ; » voilà quelle était sa pensée, pendant que, couchée sur son lit de repos, la tête appuyée sur sa main, elle se regardait dans une psyché, non avec admiration, mais avec mélancolie. « Je voudrais qu’il sût que je ne suis pas aussi méprisable qu’il le pense, que je suis dans un grand trouble, et que je voudrais être meilleure si je le pouvais ! » Elle avait, pour ainsi dire, transformé en prêtre et en confesseur, ce jeune homme qui n’avait que peu d’années de plus qu’elle, et peut-être une nouvelle éducation se préparait-elle pour Deronda, dans cette idéale consécration de Gwendolen !