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Page:Eliot - Daniel Deronda vol 2&3.djvu/378

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en général ; c’était une raison pour ne pas différer sa visite à Diplow. Il tenait aussi à s’acquitter de la promesse qu’il avait faite à Gwendolen. Deux fois il fit le voyage de Diplow et deux fois il la vit, et pourtant il revint à Londres sans lui avoir rien dit de son changement de position ni de ses projets d’avenir. Il se blâmait ; mais il redoutait le moment de cet aveu à cause de la peine qu’elle en éprouverait immanquablement. Dans la première entrevue, Gwendolen fut si absorbée par ce qu’elle avait à lui dire, elle lui adressa tant de questions auxquelles il dut répondre sur l’arrangement de sa vie, qu’il recula devant l’idée de lui parler et de lui infliger une blessure au moment où elle tendait ses mains vers lui et implorait son secours. Quand, à la seconde visite, il arriva résolu à la préparer à la révélation, il la trouva dans un état de torpeur complet ; elle s’affaissait sous d’affreux souvenirs qui la brisaient et qui l’empêchaient de songer à autre chose qu’à sa misère. Elle pleura, elle eut une crise hystérique pendant laquelle sa seule crainte, disait-elle, était qu’il ne la méprisât toujours. Il ne put donc faire autre chose que de tâcher de la calmer par de bonnes paroles, car ce n’était pas le moment de l’accabler avec une nouvelle douleur.

Le temps s’écoulait cependant, et il sentit que son devoir lui commandait de ne pas différer davantage. Il n’aurait pu lui faire cette communication par écrit, c’eût été se montrer cruel à son égard, ni la lui faire apprendre par une autre personne. Il retourna donc à Diplow, décidé à courir tous les risques plutôt que de la laisser plus longtemps dans l’ignorance.

Cette fois, Deronda trouva Hans Meyrick installé chez sir Hugo, ayant déjà commencé le portrait des trois petites filles, « dans le style de Gainsborough », et variant son travail par des excursions à Pennicote, pour faire plus ample connaissance avec les Gascoigne. La viva-