Aller au contenu

Page:Erckmann-Chatrian — L'ami Fritz (1864).djvu/250

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
237
L’AMI FRITZ.

— Hé ! s’écria Hâan, si tu trouves la brasserie monotone, toi, ce n’est pas ta faute, car, Dieu merci ! tu peux te vanter de t’y faire du bon sang ; tu t’es joliment moqué du monde, hier, avec tes citations du Cantique des cantiques. Ha ! ha ! ha !

— Maintenant, ajouta le grand Schoultz en levant sa fourchette, nous connaissons cet homme grave : quand il est sérieux, il faut rire, et quand il rit, il faut se défier. »

Fritz se mit à rire de bon cœur.

« Ah ! vous avez donc éventé la mèche, fit-il, moi qui croyais…

— Kobus, interrompit Hâan, nous te connaissons depuis longtemps, ce n’est pas à nous qu’il faut essayer d’en faire accroire. Mais, pour en revenir à ce que tu disais tout à l’heure, il est malheureusement vrai que cette vie de brasserie peut nous jouer un mauvais tour. Si l’on voit tant d’hommes gras avant l’âge, des êtres asthmatiques, boursoufflés et poussifs, des goutteux, des graveleux, des hydropiques par centaines, cela vient de la bière de Francfort, de Strasbourg, de Munich, ou de partout ailleurs ; car la bière contient trop d’eau, elle rend l’estomac paresseux, et quand l’estomac est paresseux, cela gagne tous les membres.