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Page:Erckmann-Chatrian — L'ami Fritz (1864).djvu/339

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L’AMI FRITZ.

tout cela comme si j’y étais. Alors donc, à la brasserie du Grand-Cerf, tu défiais le monde et tu célébrais l’amour… Va, va toujours, j’aime à t’entendre parler de cela. »

Et Fritz, heureux de causer de ces choses, continuait son histoire. Il ne s’interrompait de temps en temps que pour s’écrier :

« Crois-tu sérieusement qu’elle m’aime, David ?

— Oui… oui… elle t’aime, faisait le vieux rebbe, les yeux plissés.

— En es-tu bien sûr ?

— Hé ! hé ! hé ! ça va sans dire… Mais alors donc, à Bischem, vous avez eu le bonheur de danser le treielens ensemble. Tu devais être bien heureux, Kobus ?

— Oh ! » s’écriait Fritz.

Et tout l’enthousiasme du treielens lui remontait à la tête. Jamais le vieux Sichel n’avait été plus content ; il aurait écouté Kobus raconter la même chose durant un siècle, sans se fatiguer ; et, parfois, il remplissait les silences par quelque réflexion tirée de la Bible, comme : « Je t’ai réveillé sous un pommier, là où ta mère t’a enfanté, là où t’a enfanté celle qui t’a donné le jour. » Ou bien : « Beaucoup d’eau ne pourrait pas éteindre cet amour-là, et les fleuves mêmes ne le pourraient pas noyer. » Ou bien encore :