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Page:Espronceda - L’Étudiant de Salamanque, trad. Foulché-Delbosc, 1893.djvu/11

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Elvire, jadis amour de l’étudiant, tendre et heureuse, et fière de son amant, quand son cœur s’ouvrait au plaisir, comme une rose précoce au rayon du soleil : en son ardente soif, elle boit le miel trompeur qui coule des lèvres du séducteur, ne se doutant pas que, caché dans ce miel, bout le poison.

L’enfant candide ne repose pas dans les bras de sa mère avec moins de soucis qu’elle ne repose dans les liens faux et mensongers, astucieusement tissés par l’amant séducteur : douces caresses, embrassements langoureux, plaisirs qui, hélas, ne durent qu’un instant, la triste Elvire s’imagine, en sa divine illusion, que tout cela sera éternel.

Car l’âme vierge que caressa en sa pureté un charme au rêve nacré, croit tout réel et saint, prête à tout vertu et beauté. Au manteau clouté d’or du ciel bleu, à l’immortelle richesse du soleil éclatant, à l’air, aux champs, aux fleurs odorantes, elle ajoute de la splendeur, de la vie, des couleurs.

La malheureuse jeune fille, perdue par son amour, mit en don Félix tout son bonheur ; ses yeux furent à ses yeux des astres de gloire, une source de vie. Quand il scelle ses lèvres de ses lèvres, quand, ravie, elle écoute sa voix, enivrée par le dieu qui l’énamoure, elle le regarde doucement, elle l’adore extatiquement.