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Page:Féval - Le Fils du diable - Tomes 3-4.djvu/416

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Sara pensait bien qu’ils n’auraient point occasion de s’en servir ; l’arme convenable était ici le poignard ; mais il fallait faire croire au seigneur Yanos qu’une bataille était imminente. Car on avait besoin du Madgyar pour aller en avant et donner un peu de courage aux trois associés.

— Venez, dit Petite ; c’est moi qui vais vous montrer le chemin !

Elle ouvrit la marche, en effet ; chaque fois que la troupe silencieuse passait devant une des fenêtres de la galerie, on voyait la campagne illuminée au loin. La dernière croisée était ouverte ; par cette issue, avec la froide bise de la nuit, les notes affaiblies du cor parvenaient jusque dans la galerie. On sonnait l’hallali de l’autre côté de l’étang de Geldberg.

— Ils ne savent pas qu’ils font d’une pierre deux coups ! murmura Van-Praët avec son bon sourire, ils croient ne sonner qu’une mort.

— Hâtons-nous, dit Sara ; la chasse va venir et nous n’avons que le temps !

Ils montèrent sans bruit l’escalier qui conduisait à la chambre de Franz. Arrivée auprès de la porte, Sara l’ouvrit avec précaution, puis elle s’effaça pour laisser passer ses compagnons. Le Madgyar entra le premier ; il tenait un poignard à la main ; derrière lui, venaient les trois associés de Geldberg, armés d’épées. Sara franchit le seuil la dernière, comme ces chefs intrépides qui ferment la marche, pour barrer le passage aux fuyards.

La chambre de Franz était éclairée par une lampe qu’il avait oublié d’éteindre sans doute, avant de se coucher, et qui brûlait sur la tablette de la haute cheminée. La lueur répandue par cette lampe rendait les objets suffisamment distincts ; on voyait les meubles antiques, les deux armures de fer aux côtés de la porte, et tout au fond de la chambre, l’immense lit à galerie, entouré de ses rideaux fermés. Le regard d’Yanos fit d’abord le tour de la chambre, plutôt pour chercher l’ennemi à combattre que pour en connaître les détails.

Mais au moment où ses yeux tombaient sur les armures de fer il tressaillit et fit un pas à reculons.

— C’est ici !… murmura-t-il avec une sorte d’horreur.

Mira, Reinhold et Van-Praët gardèrent le silence ; ils étaient pâles et