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Page:Féval - Le Fils du diable - Tomes 3-4.djvu/823

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À moitié chemin du château, elle quitta la route battue et s’engagea sous le couvert, afin d’arriver aux derrières du parc.

Les Loups avaient mis leur masque. C’étaient tous gens vigoureux et résolus. Malgré la petite garnison qui était à Presmes, et les précautions que prenait d’ordinaire le vieux veneur, il était raisonnable de penser que le château serait emporté facilement en cas de surprise.

Mais la surprise était désormais impossible : petit René avait parlé ce jour même ; le vieux veneur, averti, se tenait sur ses gardes avant de partir pour Rennes.

Lorsque M. de Carhoat et les Loups, après avoir fait un long détour dans le parc, arrivèrent à l’endroit indiqué par le chevalier de Briant pour franchir la muraille du jardin, la nuit était avancée déjà.

Le chevalier se tenait à l’intérieur, prêt à remplir sa promesse et à ouvrir les portes du vestibule.

Mais il se gardait bien de les ouvrir d’avance comme ç’avait été son premier dessein. Les paroles de M. de Presmes durant le souper, et quelques bruits inaccoutumés qui venaient du dehors lui disaient suffisamment que des sentinelles cachées veillaient dans le jardin entre lui et ses alliés.

Il était resté coi, maudissant le hasard qui avait éventé la mine, prévoyant avec dépit la délaite maintenant possible de ses complices, et se creusant la cervelle pour trouver un moyen de changer cet échec en triomphe.

Le problème n’était point aisé à résoudre, mais M. le chevalier de Briant était un homme de ressources.

Tandis qu’il méditait, absorbé dans le travail de son esprit, il se fit soudain, au dehors, un effroyable tintamarre. Des coups de feu retentirent, mêlés à des cris de mort.

Le chevalier s’élança et mit son œil au guichet d’une croisée ; il ne vit rien, sinon des ombres noires qui s’agitaient confusément au bout de la principale allée du jardin.

Çà et là, le feu des décharges illuminait la scène pour une seconde, et lui montrait des hommes, à cheval sur la muraille du jardin, qui chancelaient et qui tombaient…

Il poussa une sourde malédiction et regagna son appartement, en se glissant le long des murs du grand escalier.

Une minute après, tout était en mouvement à l’intérieur du château. On s’appelait bruyamment, les lumières couraient par les longs corridors.

Valets, gardes, officiers de vénerie, tous s’armaient à la hâte et descendaient pour prendre part au combat.

On n’entendait plus le bruit de la fusillade ; les assaillants avaient changé de tactique sans doute.

Au premier moment, suivant les instructions de Kérizat, les Loups avaient tenté d’escalader la muraille du jardin. Mais le jardin était mieux gardé cette