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Page:Féval - Les Habits noirs, 1863, Tome II.djvu/114

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entendait ces mots sortir d’un bourdonnement confus : « Quand tu seras ma femme. »

Et les larmes qui brûlaient ses pauvres yeux répondaient : « Jamais je ne serai sa femme… »

Puis l’idée d’être seule au monde et libre d’obéir aux conseils de, son désespoir lui revenait comme ces obsédants refrains qui bercent la fièvre.

Elle étendait ses mains jointes qui tremblaient vers la chambre de sa mère.

Ce ne fut point un évanouissement, car elle rêva, mais cela ne ressembla point à un sommeil. Les belles boucles de ses cheveux touchèrent le clavier qui rendit une plainte et ses yeux se fermèrent.

……Elle était dans la chambre de sa mère ; elle éprouvait une horreur morne. Déjà les cierges allumés ! Quoi ! déjà ! Le crucifix était sur le drap et les deux mains de marbre se croisaient, auprès de la broderie qui jamais ne devait s’achever.

Fermez ! oh ! fermez, par pitié, ces yeux qui avaient des regards si tendres ! Déjà la veillée du prêtre, et déjà, déjà, le cercueil !

Mais c’était à l’instant ! Mme Leber dormait…

« Si je perdais ma mère, qui m’empêcherait de mourir ? »

Edmée avait dit cela, agenouillée et priant. Est-ce que le ciel peut exaucer les blasphèmes de la folie ?

Quelques voisins, pas un ami. Le deuil montait vers le cimetière. Déjà, déjà !

Déjà la fosse ouverte… Oh ! Michel n’était pas là pour dire adieu à celle qu’il appelait « ma mère ! »

Michel ! — Là bas ! cette calèche emportée par deux rapides chevaux ! Michel ! et cette femme, celle qu’il aime maintenant, la baronne Schwartz !…