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Page:Féval - Les Habits noirs, 1863, Tome II.djvu/129

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— De Caen ! dit Edmée, dont la voix s’altéra.

— Ce jour-là, M. Schwartz avait faim, acheva Michel ; je dis : faim. »

Il y eut un silence, après quoi Michel reprit :

« J’ai rêvé une famille composée de nos deux mères et de toi, que nous faut-il de plus ? »

Puis avec brusquerie :

« C’est fou comme tout le reste ; ma mère n’est pas malheureuse et M. Schwartz a une réputation d’honnête homme ; quoi qu’il en soit, ne me demande pas une syllabe de plus. J’ai tout dit sur ta fortune, et je reviens à la mienne qui était à faire. Écoutes-tu ? tu n’as pas l’air. »

Edmée restait pensive.

« J’écoute, dit-elle pourtant.

— Il y a des moments, pensa tout haut Michel, où nous sommes froids comme de vieux époux. »

Edmée reposa ses beaux yeux sur les siens et dit avec une passion profonde :

« Je t’aime chaque jour un peu davantage.

— Chérie ! murmura-t-il en dévorant ses mains de baisers, je ne te vaux pas, c’est vrai, mais je n’ai pas un seul péché mortel sur la conscience. C’est pour toi, pour toi seul que j’ai bien ou mal travaillé. Quoi qu’il arrive, ne prends plus jamais d’inquiétude. Je suis à toi encore plus pour moi que pour toi. Si j’ai pu vivre loin de toi, c’est que je te savais à moi. Tout me semble possible ici-bas, sauf notre séparation. Nous sommes mariés, je te le répète ; c’est ma joie et c’est ma confiance. Je réclamerais mon dû près de toi, quand même, un beau matin, tu t’éveillerais princesse, et si j’étais roi…

« Bon ! s’interrompit-il, pendant qu’elle tendait son beau front à ses lèvres. Voici la romance qui vient ! On