Aller au contenu

Page:Féval - Les Habits noirs, 1863, Tome II.djvu/222

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

voix capable de faire entendre des reproches, mais au contraire parce que cette voix depuis longtemps parlait.

Un jour, c’était peu de temps après la naissance de Blanche. Le ménage allait paisiblement, quoique la jeune femme eût d’étranges mélancolies ; l’élément affectueux ne manquait même pas tout à fait dans la maison, car il y a autour d’un berceau chéri je ne sais quelle atmosphère de tendresse ; un jour, M. Schwartz s’absenta : c’était la première fois que Julie restait seule. Elle se rendit à Saint-Roch et commanda une messe mortuaire à laquelle nul ne fut invité ; au retour de cette messe où elle avait abondamment pleuré, elle se prépara pour un voyage. Nous savons le secret de cette mélancolie : l’autre enfant était loin, le cher enfant adopté par la nourrice Madeleine. Julie ne pouvait plus résister ; il lui fallait un baiser de son fils. M. Schwartz n’était encore ni baron ni millionnaire ; Julie se fit apporter une des malles de son mari pour voyager en poste.

La malle avait l’estampille du paquebot de Jersey.

Julie n’était ni jalouse ni espiègle. Le fond de son caractère était la réserve froide de ceux qui ont un secret à garder ou un souvenir à éteindre. Pourtant, elle ouvrit cette malle avec un nerveux mouvement de curiosité.

L’âme a son instinct et le sentiment son flair.

Dans cette malle il n’y avait rien, sinon une enveloppe poudreuse qui ne portait aucun timbre et qui était bourrée de papiers.

Mais le paquet avait une adresse qui sauta aux yeux de Mme Schwartz comme un éblouissement.

Une défaillance la prit. Quand elle recouvra l’usage de ses sens, elle s’empara du paquet comme on fait d’une proie.