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Page:Féval - Les Habits noirs, 1863, Tome II.djvu/277

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trouvèrent une quantité considérable de trucs ingénieux, mais qui ne pouvaient pas servir. Tuer la femme eût été si simple ! Ils eurent des imaginations gaies ; Similor, qui avait de l’agrément dans l’esprit, proposa de mettre Saladin au mont-de-piété : histoire de rire ; Echalot n’eût pas souffert qu’on agitât la question sérieusement.

Vers huit heures, ils avaient fait huit lieues et aucun truc utile n’était sorti de leur collaboration. L’appétit grandissait : l’odeur des gargotes devenait de plus en plus attrayante ; ils se mirent à causer gourmandises et à bâtir le menu du repas de corps qu’ils devaient s’offrir le surlendemain, après « l’affaire. » Rien ne creuse l’estomac comme ce dangereux passe-temps : chaque plat évoqué surgit avec son fumet particulier ; sur cette pente, l’homme le plus sobre peut arriver à la fringale. La pensée d’un bœuf à la mode, présenté imprudemment par Similor, mit des larmes dans les yeux d’Échalot.

Il répondit fricandeau sans dissimuler son émotion. Il y a des mots qui vont à l’âme. Similor, tout voltairien qu’il était, ne put retenir un sanglot.

Ils étaient auprès de la rotonde du Temple ; la vue de tant de richesses, pendues entre les piliers : vieilles bottes, habits râpés, blouses bleues balancées par la brise, mouchoirs à carreaux, pelles à feu, balais, marmites et shakos d’uniforme pouvaient les porter à quelque extrémité, lorsque leurs yeux tombèrent simultanément sur une affiche collée à hauteur d’homme.

Qui eut l’idée du truc ? Échalot ou Similor ? Tous deux ensemble et d’une seule voix ils s’écrièrent :

« Voilà un boni de trois francs cinquante ! »

Ils avaient découvert la vaccine.

L’affiche portait en substance :