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Page:Féval - Les Habits noirs, 1863, Tome II.djvu/296

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« Impossible ! répliqua Cocotte.

— Parce que ?

— Ils en mangent !

— Après ? Quand il s’agit d’un maître…

— Et ce sont les agneaux de Toulonnais-l’Amitié pour la grande affaire, acheva Cocotte.

— Alors, dit le comte, je vais voyager pour ma santé. Que le diable emporte l’Amitié ! »

Il tourna l’angle de la Galiote et disparut dans la rue des Fossés-du-Temple.

Au moment où Cocotte s’approchait du banc, Edmée reprenait ses sens. Échalot riait parmi ses larmes à voir la vie colorer lentement ces pauvres joues ; il donnait à l’enfant de carton des baisers convulsifs. Similor, dont l’émotion également sincère était moins profonde, sentait s’éveiller en lui de coupables pensées. C’était, ce Similor, sous son costume fait pour déplaire, une étonnante incarnation de ce Christ de l’enfer, que les poètes ont baptisé don Juan. Ravagé par le besoin de séduire, il donnait déjà à ses mollets la pose la plus avantageuse et repassait un choix d’insanités cueillies au paradis des Folies-Dramatiques.

La vue de Cocotte fut un coup de théâtre. Similor craignit en lui un rival ; Échalot était prêt à défendre la victime jusqu’à la mort. Seulement, la chose des mystères avait sur eux une si magique influence, qu’aux premiers mots de Cocotte ils obéirent, chargeant le corps de la comtesse sur leurs épaules.

Préalablement, Cocotte s’était assuré du décès, non sans prendre à la morte sa broche, sa montre et ses pendants d’oreilles.

« Danger de trahir la mécanique ! prononça-t-il en guise d’explication avec une terrible emphase. Elle en mangeait ! »