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Page:Féval - Les Habits noirs, 1863, Tome II.djvu/297

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Il n’est pas superflu de faire observer que ces divers événements, si longs à raconter, furent en réalité très rapides, et que le banc du boulevard n’eut pas son funèbre fardeau pendant plus de dix minutes.

Selon l’habitude, dès que la trace du crime eut disparu, une patrouille de garde nationale, représentant la vigilance publique, passa, composée d’honnêtes gens qui radotaient l’esprit des petits journaux et ressassaient des vieux calembours.

Cocotte remit Edmée Leber entre les mains loyales de ces gardiens de la cité. Il raconta qu’il était arrivé trop tard pour s’opposer à la fuite du malfaiteur, et, corrigeant les souvenirs confus de la jeune fille, il dessina un signalement complet de M. Bruneau, le marchand d’habits.

« Voilà un bien honnête garçon, déclara le caporal.

— Il n’y a plus que des apôtres dans les rues de Paris, appuya un grenadier intelligent.

— Et l’ordre règne à Varsovie ! ajouta l’officier. En avant, marche ! si c’est un effet de votre complaisance. »

Ma foi, il faut bien arriver à le dire, Échalot et Similor étaient pendant cela au bord du canal. Cette pauvre belle comtesse Corona glissa sous l’eau avec un pavé au cou.

« Danger de trahir la mécanique ! dit Similor avec un énorme soupir. Pas de bêtises !

— N’empêche, murmura Échalot regardant d’un œil mélancolique l’eau qui allait se calmant, n’empêche que ni toi ni moi, Amédée, nous n’avons trempé nos mains innocentes dans les bijoux du cadavre. Saladin est trop petit pour garder la mémoire de ces instants.

— C’était une belle brune ! exclama Amédée. Je la reverrai bien souvent dans mes rêves. »