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Page:Féval - Les Habits noirs, 1863, Tome II.djvu/321

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deux premières pages, chargées d’une écriture fine et serrée.

« Tout ceci est là dedans, dit-elle, portant le papier à ses lèvres d’un geste involontaire et presque religieux. Le reste doit vous être lu, parce qu’il contient notre ligne de conduite.

« … L’homme qui me vendit le brassard est mort ; celui qui se servit du brassard existe. Vous le connaissez, Julie, depuis plus longtemps que moi, car il fut cause de notre départ de Corse. J’ai la main sur lui, comme il eut si longtemps la main sur moi. Dans vingt-quatre heures, l’association des Habits Noirs sera brisée.

« Je sais tout. Dieu m’a permis de lire dans votre cœur comme en un livre. Le passé ne peut pas renaître, et cependant j’ai eu bien de la joie à l’heure où mon regard a pu plonger jusqu’au fond de votre pensée. Vous avez dit vrai ; sur l’échafaud, vous m’eussiez suivi… Mais la vie avec la honte est un plus rude supplice.

« Je n’ai rien à vous pardonner. Je donnerais pour vous plus que mon sang.

« M. Schwartz, sans être coupable dans les mesures de mes premiers soupçons, a mérité un châtiment. Il sera puni dans la juste mesure de son péché : rien de plus. Il est le père d’une douce enfant dont vous êtes la mère.

« Les choses sont prévues et réglées autour de vous, indépendamment de vous ; n’oubliez pas cela. Ceux qui s’approchent imprudemment de certains rouages, mis en mouvement par la vapeur, peuvent être entraînés et broyés. Vous êtes, pour quelques heures, entourés de mystérieux engrenages, mus par une puissance plus violente que la vapeur. Ne bougez pas, c’est un conseil, et c’est un ordre.