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Page:Féval - Les Habits noirs, 1863, Tome II.djvu/342

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arrache aux pierreries des femmes, aux crachats des hommes, aux foyers des yeux. C’est toujours beau, cette nef harmonieuse, où la gaze tourbillonne, étoilée de diamants, dans la tiède atmosphère des sourires ; il y a là de l’ivresse sincère, malgré l’habitude qui blase, et la satiété fatiguée.

Ces regards parlent ; ils aiment, ne fût-ce que pour un instant. On prend le vent de ces fleurs pour le parfum des haleines ; on suit avec caresses les spirales de cette valse enchantée qu’enroule amoureusement la pensée de Weber ou de Beethoven ; c’est un bain de langueurs éblouies où les jeunes s’enivrent, où les autres, hélas ! essaient de raviver des enthousiasmes défunts. Mensonges, dira-t-on, car l’ennui bâille derrière cette merveilleuse apparence, la féerie a des dessous hideux ; les fleurs sont fanées, les femmes sont fardées…

Je ne sais. Ceux qui ont le don d’apercevoir une pièce anatomique sous l’adorable et vivant satin, enveloppe d’un corps de vingt ans m’inspirent une admiration épouvantée. Je ne vois jamais les dessous qu’aux heures détestées du travail, et si la nuit, passant sur un bouquet cueilli, le soir, a flétri déjà quelques corolles, mon regard les écarte pour saluer, au matin, le fier calice qui résiste, réjouissant la vue avec l’odorat et rehaussant pour moi l’honneur de la gerbe entière.

Que parlez-vous de mensonges ? Voici des jeunes filles ! voici ces parisiennes à la démarche exquise pour qui Phidias ressuscité amenderait le style de ses reliefs. Voici l’accent perlé des vierges de l’Athènes moderne, le doux esprit français, la grâce, l’incomparable élégance de ces femmes dont le caprice fait la mode des cinq parties du monde. Vous avez lu trop de livres, écrits par don Juan réformé, bafoué, vaincu, trop