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Page:Féval - Les Habits noirs, 1863, Tome II.djvu/373

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Ce n’était ni cruauté ni audace ; elle ne savait plus que M. Schwartz était là. Elle jeta ses deux bras autour du cou d’André ; elle se serra tout contre lui, si gracieuse et si belle que le malheureux spectateur de cette scène eut deux larmes de sang.

Il chancelait. Il avait le couteau. Un sourire d’agonisant essaya de naître sur son visage, vieilli de dix années en une minute.

« Mon mari ! mon mari ! mon mari ! dit par trois fois Julie, qui exhalait son âme en un baiser.

— Son mari ! » répéta M. Schwartz.

Il se redressa de toute sa hauteur. Un rire convulsif, aigu et court, le secoua de la tête aux pieds, puis il tomba comme une masse et ne bougea plus.

Le bruit de sa chute éveilla Julie. Dans le silence morne qui suivit, les lointains accents de l’orchestre parlèrent.

Pour la troisième fois, le cri du joueur d’orgue monta du dehors :

« Lanterne magique, pièce curieuse ! »

Le banquier gisait en travers de la porte. André et Julie restaient à se regarder : Julie défaillante et prise de terreur. André froid.

Il rompit le premier le silence.

« L’appartement de M. le baron Schwartz, dit-il avec un calme qui arrêta les battements du cœur de Julie, communique avec ses bureaux, je le sais, et je vous prie de m’enseigner le chemin de la caisse.

— Je vous y conduirai, s’écria-t-elle sans hésitation ni soupçon.

— Non, répondit-il ; je vous demande le chemin et la clef : je suis en retard. »

Elle voulut répliquer, il l’interrompit, ordonnant :

« La clef, je vous prie, madame. »