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Page:Féval - Les Habits noirs, 1863, Tome II.djvu/404

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fanfaron, moqueur, effronté, rondement cynique, et ne manquant même point d’une certaine gaieté brutale. Le masque avait glissé sur le visage de l’Ajax des Habits Noirs. Le masque tombé laissait voir l’épilepsie enragée d’un scélérat vaincu.

Son poignet droit portait les traces sanglantes du brassard ; sa chemise déchirée montrait à son cou les deux énormes meurtrissures qui l’avaient jeté bas après une lutte de quelques secondes. Il ne bougeait plus ; ses mains convulsives semblaient adhérer au parquet où ses ongles s’enfonçaient ; le souffle sortait pénible et sifflant de sa poitrine. Ses yeux demi-fermés disparaissaient dans l’ombre de ses sourcils violemment rapprochés, laissant sourdre par intervalles une lueur rougeâtre.

Le pied d’André le tenait cloué au sol.

La série des événements que nous venons de raconter s’était déroulée avec une rapidité si grande, qu’au moment où nous montrons l’intérieur du bureau de M. Champion, éclairé par les lumières venant du salon de ce même pêcheur remarquable, les vibrations de la pendule qui avait sonné deux heures étaient encore dans l’air.

André jeta un regard vers la porte ouverte, au delà de laquelle des têtes curieuses se penchaient avidement ; il ramena ses yeux sur Lecoq, immobile comme un mort ; André se méfiait et veillait.

« Ayez un flambeau, » dit-il.

M. Roland prit lui-même une lampe des mains de l’agent le plus proche.

« Que cette porte soit fermée ! ajouta André. Vos agents doivent éteindre leurs lumières et attendre en silence : d’autres malfaiteurs viendront se prendre au piège. »

Un imperceptible mouvement agita les lèvres de Lecoq. Était-ce une lueur d’espoir qui rentrait en lui ?