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Page:Féval - Les Habits noirs, 1863, Tome II.djvu/89

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gendarmes ; oh ! l’aimable gaillard ! Sans l’échafaud qui ne rit pas, Jud reviendrait, je vous l’affirme, pour fonder un café-concert qui ferait faillite et fortune.

Et Dumolard ! Que de bons mots ! Que de calembours ! À Paris, nous avons tant d’esprit !

Soit qu’elle rie, du reste, soit qu’elle demeure sérieuse, il y a un charme dans la peur. Cela est avéré. Les dames surtout aiment à frémir. Le conte de revenants, ce grand succès des temps passés, est tombé uniquement parce que les revenants ne font plus peur. Les revenants ont le tort de ne se point montrer assez souvent ; la frayeur attend, puis s’apaise, et la vogue s’enfuit avec la frayeur. Il n’y a plus de revenants.

Mais les voleurs, voilà une institution qui n’est pas menacée de périr ! À mesure que le progrès se fait et que la civilisation perfectionne son œuvre, le vol, saisi d’émulation, grandit et se développe sur une échelle tout à fait épique. Je parle seulement ici, bien entendu, du vol qui est une profession et un art, laissant de côté l’escroquerie honteuse des fournisseurs et l’ignoble fraude des marchands. Fi donc ! qu’on rive l’anneau de fer au pied de nos bandits ou qu’on leur coupe galamment la tête, mais qu’on veuille bien ne les point comparer aux obscènes marauds qui empoisonnent le vin des pauvres et qui contraignent la balance, ce symbole d’équité, à rogner la bouchée de pain de l’affamé !

Les voleurs ! les vrais voleurs ! ceux qui sont habillés de velours noir à l’Opéra-Comique et qui portent ces toques coquettes, d’où pendent des plumets rouges, ou bien ces grands feutres, plus beaux que ceux des mousquetaires ! Les voleurs de cape et d’épée ! Les bandits ! les chers bandits ! Les hommes à escopette, à bottes molles ; les hommes à guitare, s’ils sont d’Espagne ou d’Italie ; les hommes qui portent un cor d’argent en