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Page:Fabre - Chroniques, 1877.djvu/145

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distinguer M. Honey. Il marchait donc toujours, tournant le dos au Palais de Justice et allant droit à la gare Bonaventure. Enfin, ne trouvant pas le greffe et ne voyant pas venir M. Honey, il se décida à demander des renseignements.

Après avoir ôté cinq ou six fois son chapeau en vain, il parvint à aborder un passant :

— Monsieur, lui dit-il, excusez-moi si je vous arrête. C’est la nécessité qui me pousse à cette extrémité. Je suis arrivé à la ville ce matin et je suis clerc depuis une heure chez M. X., le célèbre avocat. Il m’a donné ordre de porter ce papier à M. Honey, au greffe. Or, je ne connais pas M. Honey et je ne sais point où est le greffe ; vous voyez mon embarras cruel.

Le passant était humain ; de plus il s’en allait du côté du Palais de Justice ; il lui jeta une corde de sauvetage et l’entraîna vers la statue de Nelson. Il lâcha le timide étudiant à la porte du Palais. Celui-ci, après avoir pris ses précautions, avoir essuyé son front humide et secoué la poussière de ses bottes, frappa tout doucement. Personne ne vint, il redoubla. En ce moment, la porte s’ouvrit et un avocat passa à côté de l’étudiant :

— Pardon ! Monsieur, lui dit celui-ci, je suis clerc chez M. X., le célèbre avocat ; il m’a donné un fiat à porter au greffe, à M. Honey. Auriez-vous la complaisance de me dire où est le greffe et si je puis voir M. Honey ?

— Allez tout droit, dit l’avocat.

L’étudiant franchit le seuil du Palais avec l’émotion d’un criminel novice qui va comparaître devant ses juges. Il tenait le fiat à deux mains.

Mais ce n’était que la double porte que lui avait ouverte l’avocat : il se cassa le nez sur une seconde porte. Il frappa, et voyant que personne ne répondait : Entrez, il se hasarda à entr’ouvrir et à regarder dans le corridor. Le corridor était désert, il s’y risqua ; mais à peine avait-il fait quelques pas,