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Page:Fleuret - Histoire de la bienheureuse Raton, fille de joie, 1931.djvu/133

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M. Peixotte fit sa rentrée comme elle se dirigeait vers la porte, après avoir ramassé le rosaire à six dizaines qu’elle tint dans sa main fermée, encore qu’il débordât de toutes parts.

— Où vas-tu, ma chère enfant ? Tout ce qui vient de se passer n’était qu’un simulacre, une comédie de l’amour ; comment t’expliquer cela ? Moi-même, pour commencer, je n’étais pas très sûr que tu fusses sincère. On est si souvent trompé !… Viens ici, Raton. T’ai-je fait vraiment beaucoup de mal ?… Tiens, voici mille livres, mon enfant… Mais assieds-toi près de moi. Je vais sonner pour que l’on apporte à goûter.

Raton poussa un cri, car elle pouvait à peine s’asseoir sur l’ottomane où la poussait M. Peixotte. Celui-ci était aux petits soins, et Raton ne pouvait deviner la cause d’un changement si subit. Un valet vint apporter sur un plateau de vermeil un goûter magnifique où abondait Pomone orientale et dont se serait nourrie toute une famille de pauvres, si les pauvres se nourrissaient d’ananas, de muscat, d’oranges, de mirobolants et de massepains. Raton n’y voulut pas toucher.

L’inquiétude de M. Peixotte se manifestait dans toute sa personne par des tics et des mouvements multipliés. Les idées les plus folles traversèrent son cerveau ; mais, comme il n’était pas encore sûr que Raton ne fût