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Page:Fleuret - Histoire de la bienheureuse Raton, fille de joie, 1931.djvu/238

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dehors. Eh quoi ? quel beau siècle que le nôtre ! Le monde devrait finir avec nous…

« Mais en vérité, il te convient de fulminer ici contre la débauche, toi qui tires ta pitance des largesses dont la débauche est prodigue, et que tu ramasserais à quatre pattes en grognant de contentement. Souviens-toi que l’on peut lire mon nom sur ton collier !…

— Peuh ! répondit l’abbé, l’on philosophe où l’on peut et dans l’état où l’on se trouve, qui semble parfois si contraire ! Apprends donc qu’Ésope, réduit à l’esclavage, s’exprimait avec une aisance ailée ; que Marcus Plautus, qui rédigea dans son Asinaire les premiers statuts des courtisanes romaines, écrivit trois comédies étant au servage d’un meunier dont il tournait la meule ; que Sénèque, qui était riche, entreprit l’éloge de la pauvreté, et tel qui n’avait point de poux, peut-être même ni poil ni mèche, celui de cet insecte prolifique.

— Voilà donc, fit la Mère, un éloge que tu n’entreprendras mie ! Non plus que celui de la puce, car tu en donnes comme un chien ! Tu voudras bien en réserver ce soir à M. de Mazan, qui attend plutôt de toi de la musique et des mômeries. Je te donnerai pour ta peine ; en outre, peut-être attraperas-tu quelques verres de vin mousseux, que je baptise champagne mais qui n’en grise pas moins, tant l’illusion peut agir sur les sens.