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Page:Fleuret - Histoire de la bienheureuse Raton, fille de joie, 1931.djvu/350

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de maison confondus. Cela n’allait pas sans réclamations, et l’on en pouvait percevoir, à travers l’In exitu Israël qu’entonnaient déjà les prêtres à l’imposition des habits. M. le Duc, entendant distinctement le juron familier de son valet, se promettait de se défaire de son insupportable personne. En vérité, les oreilles de Poitou s’étaient tendues au dehors, et sa religion se trouvait éclairée sur le compte de Mlle Raton. Son juron témoignait de sa colère envers l’abbé Lapin qui venait de le bousculer et prétendait, malgré lui, Poitou, se rendre à la grille en soutenant la bonne nourrice toute noyée de larmes. Ce juron contenait aussi la plus ferme promesse de représailles, car Poitou venait de remarquer l’intimité de l’abbé et de la Gourdan, et il établissait subitement une relation entre la visite à l’hôtel, le départ de Raton, et toutes ces filles emplumées qui ne se tenaient pas de verser des pleurs.

Enfin, le rideau de la grille s’écarta. Raton parut, debout, son cierge à la main, recouverte d’une chape blanche et d’un voile blanc. De chaque côté d’elle se voyaient les moniales agenouillées l’une derrière l’autre, le voile noir rabattu sur le visage, et portant des flambeaux funèbres qui pleuraient à grosses gouttes sur le parquet. Elle demeura là, pareille à une statue, regardant la foule sans la voir, et sourde à un sanglot désespéré