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Page:Fleuret - Histoire de la bienheureuse Raton, fille de joie, 1931.djvu/44

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Duchesse. Il faut conserver son estime et la mienne. Aussi, je ne veux point de commerce avec le reste de la maison. Tu couches dans la garde-robe ; on t’y montera tes repas, qui seront prélevés sur ma desserte. Quand tu entendras sonner, c’est qu’il te faudra les prendre dans le tour de la garde-robe. Tous les jours tu m’accompagneras au couvent de l’Annonciation où j’entends la messe. Ce sera pour toi l’occasion de préparer ton salut et d’achever la bonne éducation que l’on t’a donnée. La religion, mon enfant, n’est pas seulement un guide, elle nous fait entrevoir un repos et des joies futures que l’on ne trouve pas ici-bas à quelque condition que l’on appartienne. Et comme notre chétif entendement n’a pu définir le bonheur qui nous attend, nous l’imaginons selon nos préférences et nos facultés. Cette incertitude même où Dieu nous laisse ne saurait être qu’un bien : nous rêvons, nous occupons notre esprit. Autrement, il serait sollicité par la poursuite des plaisirs temporels et nous manquerions notre salut. Donne-moi mon rouge, mon enfant, et viens me passer ma robe…

« La religion ne nous fait pas seulement rêver de l’avenir, mais encore du passé. L’histoire des premiers âges du monde qu’elle nous a conservée est le plus attachant des romans. Comme c’est Dieu lui-même qui l’a fait, il ne s’y trouve rien qui choque le goût ou la vérité.