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Page:Fleuret - Histoire de la bienheureuse Raton, fille de joie, 1931.djvu/57

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— Ah ! ah ! ah !… Regardez, mais regardez donc, Mademoiselle Raton !… C’est Poitou, Grand-Jean et P’tit-Louis qui font des leurs… Hi hi !… C’est tellement drôle que je m’mouille… et que j’vas… ah ! ah ! que j’vas me répandre sus l’parquet !…

Raton n’en serrait son tablier qu’avec plus de force. Comme elle entendait les valets approcher, elle se leva vivement, traversa la chambre de sa maîtresse pour s’aller réfugier dans le boudoir. Là, elle se jeta dans un fauteuil, se vouant à Dieu, et regardant avec terreur du côté de la porte si ses persécuteurs auraient l’audace de la franchir.

Ils le firent le plus aisément du monde. Poitou passa le premier. Vêtu d’une robe de chambre de son maître, coiffé d’une de ses perruques poudrées, il marchait avec une dignité comique que Raton ne sut pas apprécier, les pieds en équerre et la main sur le rognon. Sa haute canne de cérémonie formait angle ouvert avec son corps. Le visage coloré de safran, il exagérait l’aspect de M. le Duc, toujours un peu barbouillé d’ictère. Derrière lui parurent Grand-Jean en droguiste de l’ancien théâtre, coiffé d’une enveloppe de pain de sucre, drapé d’une blouse noire, des lunettes sur le nez, la trogne cramoisie, et le clystère sur l’épaule ; enfin, Petit-Louis, pareillement fagoté et portant le vase indispensable. Il grimaçait de dégoût en