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Page:Fleuret - Histoire de la bienheureuse Raton, fille de joie, 1931.djvu/98

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l’empressement, et, pour tout dire, de l’émulation. Vous l’attacheriez à la desserte. Enfin, vous n’imaginez pas qu’elle s’amuse dans vos appartements. Elle aura bientôt des vapeurs comme une grande dame ; son joli teint ne tardera pas à se faner.

— Armand, mon bon ami, répondit Mme la Duchesse, je suis étonnée que vous descendiez à ces petites choses qui ne me traversent pas souvent la tête. Mais si je nourris ma camériste à l’écart, c’est pour lui éviter le contact de nos gens. Des vapeurs, dites-vous ?… Allons donc ! Dernièrement, je l’ai surprise dans ma chambre en train de danser le menuet. Son petit magot se trouvant répandu sur mon lit, j’ai pensé qu’après l’avoir compté elle manifestait sa joie. À dire le vrai, c’est une fille un peu bizarre. Je la conduis au Carmel, elle y rêve et n’y prie point. Mais voilà qu’un beau jour l’idée lui vient de prendre le voile !… Je lui avais peut-être trop parlé de religion. Bah ! cet enfantillage n’as pas tenu devant l’objection que je lui fis de la dot de cinq mille livres qu’exige la communauté. Après tout, je préfère la savoir dans ces idées qui garantissent sa vertu. Chose curieuse, mon ami, elle lit couramment la Bible que je lui ai donnée, elle qui savait à peine lire. Elle médite là-dessus au point de négliger un peu son travail, que vous savez n’être pas excessif.

— C’est un miracle, ma bonne amie ! dit M. le