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Page:Fleuret - Histoire de la bienheureuse Raton, fille de joie, 1931.djvu/99

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Duc qui retenait une forte envie de rire. Un miracle, oui-dà ! Je crois me souvenir que ce fut un peu le cas de sainte Catherine de Sienne. Et l’on a vu des pastoures illettrées répondre à des théologiens dans la langue des Pères de l’Église. On souhaiterait que la vôtre se prît à réciter les odelettes de Catulle…

Raton avait été fort étonnée elle-même de lire sans effort la Bible de Royaumont, le soir de son entretien avec M. le Duc et de sa conversation tumultueuse avec Poitou. Elle en rendit grâces au Divin Maître, car elle ne pouvait douter que la lumière ne lui vînt d’En-haut, qui refoulait ainsi les ténèbres de son ignorance.

Elle avait revu plusieurs fois l’image du Sauveur se substituer soit au tableau de M. Le Brun, soit au portrait de son maître, et plusieurs fois encore M. Poitou succéder à M. le Duc pour partager son plaisir et ses libéralités. Le maître et le valet s’étaient trouvés égaux devant l’amour, c’est-à-dire que ni l’un ni l’autre n’avaient réussi d’émouvoir Raton. M. Poitou s’en souciait peu. M. le Duc s’était détaché.

— Je te ferai connaître un homme d’Église, avait-il dit à Raton. Une telle constance dans la vocation, de si plaisants détours pour parvenir au terme d’aussi graves desseins ne manqueront pas de l’intéresser, ni ta beauté de l’attendrir.