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Page:Gérard - La chasse au lion, 1864.djvu/82

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Le vieux cheik insista beaucoup d’abord pour me faire rentrer au douar, ensuite pour me laisser quelques hommes, qu’à leur mine je jugeai peu soucieux de rester.

Je refusai ces deux proportions et l’engageai à se retirer avec son monde ; car la nuit approchait et les lions pouvaient descendre d’un moment à l’autre.

Ce brave homme se rendit, bien à regret, à mon invitation, et me demanda, avant de me quitter, la permission de faire avec les siens la prière du soir (sallat el maghreb), afin, dit-il, que Dieu veillât sur moi durant cette nuit, où personne dans la montagne ne fermerait l’œil, et où grands et petits attendraient, le cœur serré, que mon fusil leur parlât.

Tant pis pour ceux qui ne croient pas ; moi, je crois fermement, et je le dis tout haut, au risque de passer pour ridicule aux yeux des imbéciles qui jouent le rôle d’athées, et de l’opinion desquels je me soucie autant que de la poudre que je brûlais aux moineaux quand j’avais douze ans.

Le spectacle de ces hommes, d’une religion différente et hostile à la nôtre, priant pour un chrétien, m’émut profondément, et je regrettai que les usages et les rites du culte que je professe me fissent une loi de ne m’associer que