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Page:Gabriel Ferry - Les aventures d'un Français au pays de Caciques, 1881.djvu/135

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menté de la façon la plus attrayante un spectacle que j’aimais passionnément. Le moment étant peu favorable pour questionner à mon tour l’évangéliste, je ne crus pas devoir me rapprocher du groupe, et je restai à quelques pas de la boutique, attendant avec patience le moment où le nouveau visiteur de Tio Luquillas se serait éloigné. Cet homme qu’une heure ou deux de causerie m’avaient seules fait connaître, m’inspirait une sorte d’intérêt. Il était âgé de quarante ans environ. Ses traits ne manquaient pas de noblesse, malgré l’expression de sombre ironie qui venait souvent en altérer la régularité. À défaut du souvenir de notre première rencontre, l’étrangeté de son costume eût suffi pour me le faire remarquer. L’amateur de taureaux portait un ample manteau bleu doublé de rouge, et il avait pour coiffure un vaste chapeau de vigogne fauve bordé de larges galons d’or.

– Pour qui est cette lettre, mon enfant ? demanda-t-il à la grisette avec un certain air d’autorité.

La jeune fille désigna de la main la prison du palais présidentiel, et murmura un nom que je n’entendis pas.

– Ah c’est pour Pepito ? répliqua l’inconnu à haute voix.

– Hélas ! oui, et je ne sais comment la lui faire parvenir, répondit la jeune fille.