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Page:Gabriel Ferry - Les aventures d'un Français au pays de Caciques, 1881.djvu/147

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un pareil tripot, au moment où je croyais me voir introduire dans le cabinet d’un légiste. Aussi me mis-je à regarder mon compagnon comme si je le voyais pour la première fois : c’était bien l’homme que j’avais rencontré dans les gradins du cirque et sous les Arcades des Marchands. Avec son costume étrange, sa longue rapière, sa chevelure épaisse et hérissée, don Tadeo avait la tournure d’un bandit beaucoup plus que d’un jurisconsulte. À peine eut-il fait quelques pas dans la salle, qu’il fut accosté par deux individus qui semblaient les dignes habitués de cette caverne : ce fut d’abord une espèce de géant à l’air farouche et gauche, qui tendit au licencié une main large comme une éclanche de mouton, et lui dit en espagnol, avec un accent anglais fortement prononcé :

— Comment se porte le seigneur don Tadeo ?

— Mieux que ceux à qui vous pouvez en vouloir, maître John Pearce, répondit celui-ci en arrêtant sur son interlocuteur un regard froid et perçant comme une lame d’épée. Savez-vous bien que votre réputation est faite maintenant au Mexique comme au Texas, surtout depuis que…

— Chut ! reprit l’Américain, peu désireux évidemment d’entendre le licencié achever sa phrase. Avec votre permission, j’ai à vous consulter.

– Tout à l’heure, répondit l’homme de loi. Je