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Page:Gabriel Ferry - Les aventures d'un Français au pays de Caciques, 1881.djvu/232

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ment de la mêlée, dont leurs instruments sont souvent les premières victimes, les musiciens se retirèrent précipitamment à l’écart. Quelques prescriptions du cérémonial habituel restaient encore à remplir ; les prétendants avaient à racheter les gages dont ils avaient paré la danseuse. L’usage fixe ce rachat à un demi-réal. Les deux rivaux s’avancèrent l’un après l’autre, et remplirent de monnaie d’argent les deux mains de Sacramenta. Tandis qu’elle recevait, au milieu du murmure flatteur excité par la prodigalité des deux hommes, une offrande à laquelle elle ne pouvait, sans grossièreté, se soustraire, ses deux petites mains étendues tremblaient involontairement et ses lèvres pâlies essayaient, mais en vain, de sourire. Calros cherchait aussi vainement dans ses yeux un regard d’encouragement. Pâle et muette, embellie par une émotion qu’elle ne pouvait dissimuler, la jeune fille cachait toujours avec le même soin, sous ses longues paupières baissées vers la terre, la préférence qu’elle ressentait sans doute en secret pour l’un des deux rivaux. Le sabre allait décider la question, et les plaisirs de la fête allaient être complets pour mon hôte en dépit de ses sage résolutions, quand une femme, fendant la foule, vint lui rappeler le serment qu’il allait violer. C’était la mère de celui dont il devait venger la mort.