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Page:Gabriel Ferry - Les aventures d'un Français au pays de Caciques, 1881.djvu/256

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détail le plus important, le plus mystérieux aussi de la scène à laquelle je venais d’assister : le navire naufragé avait été perdu par une fausse indication ; le fanal qui l’avait attiré sur un banc de rochers avait été allumé par les mains perfides d’un de ces maraudeurs pour qui tout naufrage est une occasion de butin. Tout en racontant l’épisode où il venait par son courage de jouer un rôle si honorable, Ventura promenait autour de lui des regards irrités ; il semblait chercher celui dont l’odieuse manœuvre avait causé la perte de la goëlette. Je ne pus m’empêcher alors de penser à l’individu que j’avais vu chevaucher devant moi avant d’arriver à Boca-del-Rio et qui, au premier signal de détresse donné par le navire, avait lancé si brusquement sa monture au galop dans la direction de la mer.

– Malédiction, s’écria Ventura en terminant son récit, malédiction sur ces maraudeurs que le vent du nord attire vers la plage pour piller les naufragés ou les débris des cargaisons ! Que l’enfer confonde surtout le coquin qui nous a fait échouer pour satisfaire son infernale et maladroite cupidité !

Pendant qu’il parlait, un mouvement donné au cordage, qui fléchissait sous une violente pression, annonça que les matelots de la goëlette s’aidaient de cette amarre pour gagner la terre. En effet, tantôt à la nage, tantôt en prenant pied, les hommes du