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Page:Gabriel Ferry - Les aventures d'un Français au pays de Caciques, 1881.djvu/285

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— Eh bien ! j’en suis fâché, dit le pilote, et je regretterai toujours un compagnon qui manie l’aviron aussi bien que le sabre. À nous deux, nous aurions pu faire quelque coup d’éclat dans mon métier. Adieu donc, et que chacun de nous suive son destin !

Nous nous séparâmes, et j’accompagnai Calros à la cabane où il avait laissé son cheval. Pendant notre absence, les bûcherons avaient retrouvé le mien à peu de distance dans les bois.

— C’est ici que nous allons nous séparer, me dit Calros, vous allez revoir bientôt votre pays, et moi…

Il n’acheva pas ; je complétai sa pensée, et j’y répondis en l’engageant à retourner à Manantial. N’y avait-il donc aucun motif de consolation pour lui dans les épisodes du naïf roman qui s’était déroulé devant moi depuis la fleur de suchil tombée de la chevelure de Sacramenta, la veille du fandango, jusqu’au nœud de rubans si vaillamment conquis le lendemain ! J’oubliai que la passion a des intuitions auxquelles les meilleurs raisonnements sont de faibles réponses, et j’essayai, mais en vain, de prouver à Calros que son désespoir était au moins prématuré.

— Les paroles du pilote, me dit-il, n’ont été que l’écho d’une voix qui me criait sans cesse : Sacramenta ne t’a jamais aimé.