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Page:Gabriel Ferry - Les aventures d'un Français au pays de Caciques, 1881.djvu/51

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préoccupations, car le lépero s’approcha de moi et me dit en forme de consolation :

– Voyez-vous, seigneur cavalier, il en est de tuer un homme comme d’autre chose ; il n’y a que le premier pas qui coûte. D’ailleurs, votre sereno fera peut-être comme mon Anglais, qui aujourd’hui se porte mieux que jamais. Ces hérétiques ont la vie si dure ! Ah ! seigneur cavalier, continua Perico en soupirant, j’ai toujours regretté de ne pas être hérétique.

— Pour avoir la vie dure ?

— Non, pour me faire payer mon abjuration. Malheureusement ma réputation de bon chrétien est trop bien établie.

— Mais ce cavalier que vous deviez tuer ? – demandai-je à Perico, me trouvant tout naturellement ramené au souvenir du mélancolique jeune homme que j’avais vu agenouillé devant la morgue, – croyez-vous qu’il vive encore ?

Perico secoua la tête.

— Demain peut-être sa folle passion lui aura coûté la vie, et sa maîtresse ne lui survivra pas. Pour moi, je n’ai pas voulu faire deux victimes à la fois, et j’ai renoncé à cette affaire.

– Ces sentiments vous honorent, Perico.

Perico voulut profiter de l’impression favorable que sa réponse venait de produire sur moi :