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Page:Gabriel Ferry - Les aventures d'un Français au pays de Caciques, 1881.djvu/59

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teau à la main, bientôt suivi par une femme échevelée qui poussait des cris aigus.

– Me laisserez-vous assassiner ainsi s’écriait pitoyablement l’individu poursuivi, personne ne me donnera un couteau ?

— Laissez-moi, laissez-moi ouvrir le ventre de ce larron d’honneur hurlait le mari outragé.

Les femmes, par esprit de corps sans doute, poussèrent toutes à la fois des cris lamentables et se jetèrent entre les deux adversaires, tandis qu’un des amis de l’offenseur lui remettait furtivement un long couteau entre les mains. Celui-ci se retourna et se lança intrépidement à la rencontre de son rival. Les cris des femmes redoublèrent ; ce fut une infernale confusion. Les deux ennemis acharnés, faisaient des efforts prodigieux pour fendre les groupes agglomérés entre eux. Le sang allait couler, quand, dans la lutte engagée entre tous, la table qui supportait l’enfant mort fut renversée. Le corps alla heurter le carreau avec un bruit sourd, et les fleurs qui le couvraient jonchèrent le sol. Un large cercle s’ouvrit aussitôt autour du cadavre profané. Un cri perçant domina tout ce tumulte, et la mère désolée se jeta sur les restes de son enfant avec une suprême et navrante douleur.

J’en avais trop vu. Je m’élançai vers le balcon pour jeter un dernier regard sur la rue et m’assu-