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Page:Gabriel Ferry - Les aventures d'un Français au pays de Caciques, 1881.djvu/77

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hautes herbes. Mon imagination chercha bientôt à établir quelque lien romanesque entre le triste vieillard et la tonnelle abandonnée. Je résolus de lier conversation avec lui : cette conscience si tourmentée ne pouvait manquer d’avoir quelques curieuses révélations à faire ; mais des tentatives inutiles, bien que réitérées, pour arracher le sombre promeneur à sa taciturnité habituelle me détournèrent de donner suite à ce projet. Les mains croisées sous ses larges manches, la tête baissée, le moine, chaque fois qu’il me rencontrait, pressait le pas, pour se soustraire plus vite à ma vue. Chaque fois aussi je suivais longtemps du regard cet homme, dont la physionomie intelligente et sévère contrastait vivement avec l’air hébété des autres moines. Cette figure, qui trahissait tantôt un douloureux abattement, tantôt une exaltation fanatique, me rappelait à la fois et les légendes merveilleuses et les récits lugubres que je lisais dans la bibliothèque du couvent. Devais-je m’en tenir à des conjectures sur ce singulier personnage ? Désespérant de l’amener jamais à rompre le silence avec moi, je résolus de questionner à son sujet fray Serapio, et c’est avec l’espoir de rencontrer le joyeux franciscain que je me dirigeai, un jour de la semaine sainte, vers une des plus riantes promenades des environs de Mexico, le canal de la Viga. Le désir