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Page:Garnir - À la Boule plate.djvu/82

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Quand elle eut jacassé un peu et bu son bock, elle fit un salut gentil, sans paraître avoir remarqué l’air revêche de Flagothier et alla dans l’autre salle s’accouder au comptoir, où elle prit un bonekamp avec Alembert Picquet.

— Elle est drôlette… et vraiment pas laide, dit Charles.

— Allons, allons, Monsieur Charles, dit Flagothier d’un air de compassion et d’autorité ; elle ne vaut pas le coup de fusil !

Ce que Flagothier ne disait pas, c’est que Mme Fampin avait eu « le fort béguin » pour lui et que — peut-être par simple forfanterie de mâle qui aime à se dire qu’étant désiré il se refuse — il l’avait « espacée », méconnaissant ses pressions de mains, ignorant ses œillades, déclinant ses avances. Il était, vis-à-vis d’elle, méprisant avec une tranquille joie.

On l’appelait, elle, Mme Fampin, mais personne n’avait jamais connu M. Fampin ; elle était, au vu et au su de tous, la maîtresse en titre d’un tripier de la rue des Bouchers que l’on ne voyait jamais plus à la Boule Plate qu’on ne la voyait, elle, à la triperie. Cette frêle, mince et souple petite femme avalait des tonneaux, sans que jamais personne l’eût vue pocharde. Le tripier, s’étant dûment et congrûment convaincu, après trois mois de collage, qu’aucune