Page:Gervaise de Latouche - Histoire de Dom Bougre, Portier des Chartreux,1922.djvu/104

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fait sur moi l’impression qu’elle s’était promise d’y faire, elle me dissimulait adroitement sa satisfaction, et, par une politique mal entendue, elle combattait encore en elle-même le doux penchant qui devait être le prix de l’ardeur qu’elle m’inspirait. Autant ses discours m’avaient causé d’étonnement, autant me donnèrent-ils d’espérance. Ces peintures si vives et si animées des situations et des sentiments de la Sœur Monique, dans une circonstance à peu près semblable à celle où nous nous trouvions, ne pouvaient partir que d’un cœur pénétré. Elle ne m’avait rien caché de ses propres actions, elle ne m’avait pas même déguisé sa sensibilité pour les plaisirs de l’amour. Elle avait dit tous les mots : rien n’avait été fardé. Si nous eussions été dans l’allée, elle n’aurait pas dit un mot que je n’en eusse profité, elle n’aurait pas fait une peinture que je n’y eusse joint la représentation au naturel. Elle n’avait pas voulu y venir. Que devais-je penser de cette résistance ? Comment l’accorder avec ce que je venais d’entendre ? Ah ! si j’avais pu lire dans son cœur, que je me serais épargné d’inquiétude ! Ferme dans la résolution de suivre mon dessein, mais en garde contre une précipitation qui aurait pu effaroucher Suzon, je pris mes mesures d’une façon détournée. J’allai chercher dans le récit même qu’elle venait de me faire des armes pour la combattre. Je me contentai de lui demander d’abord, avec un air d’indifférence, si la Sœur Monique était jolie.

— Comme un Ange, me répondit-elle. Je ne sais pas ce qu’il faut pour faire une fille qui plaise, mais je m’imagine que pour plaire elle doit être faite comme la Sœur Monique. Sa taille est fine et bien prise ; sa peau est d’une blancheur, d’une douceur parfaites ; elle a la