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Page:Gervaise de Latouche - Histoire de Dom Bougre, Portier des Chartreux,1922.djvu/138

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soutint sur le même ton les railleries que madame Dinville ne lui ménageait pas.

Elle s’habilla ; l’abbé, malgré le mauvais état de son visage, fit le coquet à la toilette, dit des impertinences, contrôla la coiffure, fit des contes à madame Dinville qui riait de ses balivernes. La suivante pestait contre ses corrections, et moi je riais de la figure du petit homme. Allons dîner.

Nous étions quatre à table : madame Dinville, Suzon, l’abbé et moi. Qui fit une sotte figure ? Ce fut moi, quand je me vis placé vis-à-vis de Suzon ; l’abbé, qui était à son côté, faisait bonne mine à mauvais jeu et paraissait bien embarrassé à persuader à madame Dinville que les traits railleurs dont elle l’accablait n’étaient pas capables de le déconcerter. Suzon n’était guère moins confuse, cependant je croyais voir dans ses regards furtifs qu’elle n’aurait pas été fâchée que nous eussions été seuls. Sa vue m’avait encore rendu infidèle à madame Dinville, et je souhaitais avec impatience que nous fussions sortis de table dans l’espérance de trouver quelque moyen de nous dérober. Le dîner fini, je fis signe à Suzon : elle m’entendit, elle sortit. J’allais la suivre ; madame Dinville m’arrêta en me disant qu’elle voulait que je lui servisse d’écuyer à la promenade. Se promener à quatre heures après-midi dans l’été ! La proposition parut extravagante à l’abbé, mais ce n’était pas pour avoir son approbation qu’elle la faisait. Elle avait ses vues ; elle savait qu’il était trop amoureux de son teint pour l’exposer avec aussi peu de ménagement à l’ardeur du soleil : aussi prit-il le sage parti de rester. J’aurais bien voulu me dispenser de suivre la dame pour aller rejoindre Suzon, mais je n’osais proposer un prétexte, et je sacrifiai mon envie à