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Page:Gorki - Contes d Italie.djvu/119

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LA MÈRE DU MONSTRE

duisit tous. À l’un d’eux qui lui plaisait mieux que tous les autres, elle dit :

— Je ne puis être ta femme. J’ai peur d’enfanter encore un monstre. Ce serait une honte pour toi. Non, va-t-en !

L’homme insista, lui rappela la Madone qui est juste envers les mères et les considère comme ses sœurs. La mère du monstre lui répondit :

— Je ne sais de quoi je suis coupable : hélas ! je suis punie bien cruellement.

Il supplia, pleura, se mit en colère, mais elle répéta, obstinée :

— J’ai peur… je n’ai plus foi dans mon destin… Va-t-en !

Il partit alors très loin et disparut à jamais.

Et ainsi, pendant de longues années, elle remplit la gueule sans fond qui mâchait toujours. Le monstre engloutissait le fruit de son travail, son sang et sa vie. La tête de l’avorton se développait et devenait toujours