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Page:Gorki - Contes d Italie.djvu/168

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CONTES D’ITALIE

était ligaturée par les tendons des poutrelles de fer et le bois jaune posé dans la lourde masse comme des cordons de nerfs. De loin, elle apercevait la silhouette de son frère : pareil à un crabe, il rampait sur l’échafaudage, une canne à la main, coiffé d’un chapeau fripé. De retour à la maison, elle regardait fixement le visage excité du bossu, dont les yeux noirs étaient devenus plus doux et plus clairs.

— Non, disait-il à mi-voix ; j’ai eu une bonne idée ; ce que je fais sera aussi profitable pour vous, gens normaux, que pour nous, êtres infirmes. Notre hideur ne blessera plus votre beauté ! D’ailleurs c’est une affaire merveilleuse que de bâtir, et il me semble que je vais bientôt me considérer comme un homme heureux…

Elle lui demanda, en toisant d’un œil énigmatique le corps difforme de son frère :

— Heureux ?

— Oui ! Sais-tu que les gens qui travaillent ne nous ressemblent absolument pas ; ils font naître des pensées toutes diffé-