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Page:Haeckel - Religion et Évolution, trad. Bos, 1907.djvu/22

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domaine cosmologique, a été posée en 1755, par notre célèbre philosophe critique, Emmanuel Kant, dans sa belle œuvre de jeunesse intitulée : Histoire naturelle du monde et théorie du Ciel, ou Essai sur la composition et l’origine mécanique du Cosmos, d’après les principes newtoniens. Cette œuvre remarquable parut anonyme, elle était dédiée à Frédéric le Grand, mais elle ne parvint jamais à sa connaissance ; elle fut d’ailleurs peu remarquée, bientôt complètement oubliée, jusqu’à ce que, quatre-vingt-dix ans plus tard, Alexandre de Humboldt la tirât de cet oubli. Remarquez bien que, dans le titre, l’auteur insiste sur l’origine mécanique du monde et les principes newtoniens de son explication, c’est-à-dire que le caractère rigoureusement moniste de la cosmogonie tout entière et la valeur absolue des lois de la nature sont clairement exprimés. Sans doute, Kant, dans ce livre, parle beaucoup de Dieu, de sa sagesse et de sa toute-puissance ; mais cette dernière se borne, au fond, à ceci, que Dieu a créé une fois pour toutes les lois fixes et invariables de la nature et qu’actuellement, lié par elles, il n’exerce son action universelle que par l’entremise de ces lois par lui créées. Le dualisme, qui apparaîtra plus tard d’une manière si caractéristique chez le philosophe de Koenigsberg, ne joue encore ici qu’un rôle insignifiant.

Quarante ans plus tard, l’explication naturelle du développement cosmique apparaît, plus claire et plus conséquente, rigoureusement fondée, en outre, sur les mathématiques, dans l’œuvre admirable qu’est la Mécanique Céleste de Pierre Laplace ; son livre populaire, l’Exposition du système du monde (1796) ébranla jusque