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Page:Haeckel - Religion et Évolution, trad. Bos, 1907.djvu/30

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théorie de la sélection, qui fournit de la transformation de l’espèce une explication causale, est à proprement parler la seule qu’au sens rigoureux on devrait appeler « darwinisme. » Dans quelle mesure cette théorie est-elle justifiée, dans quelle mesure convient-il de la modifier par des théories plus nouvelles, telles que la théorie du plasma germinatif de Weismann (1884), celle de la mutation de De Vries (1900) ? ce sont là des questions sur lesquelles nous ne pouvons pas nous étendre aujourd’hui. Ce qui nous intéresse bien davantage, c’est l’influence sans exemple que le darwinisme et son application à l’homme ont exercée depuis quarante ans dans toutes les branches du savoir humain ; puis l’opposition dans laquelle cette théorie devait forcément se trouver vis-à-vis des dogmes de l’Église.

De toutes les conséquences qu’entraînait la théorie de la descendance, la plus intéressante et la plus grave était celle qui résultait de l’application anthropologique de la doctrine. Puisque tous les autres organismes s’étaient produits sans miracle, puisqu’ils étaient issus par des procédés naturels, de formes vivantes antérieures au moyen de transformations, il fallait nécessairement que la race humaine, elle aussi, provînt par transformation, des mammifères les plus analogues à l’homme, des « Primates » de Linné : singes et demi-singes. Cette conséquence naturelle, que déjà Lamarck avait tirée en toute simplicité, sans chercher à la dissimuler, que Darwin, au contraire, avait d’abord supprimée intentionnellement, fut exposée tout au long par un zoologiste anglais de génie, Thomas Huxley (1863) dans ses trois conférences sur « La place de l’homme dans la nature ».