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Page:Henriet - Le paysagiste aux champs, 1876.djvu/25

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LE PAYSAGISTE AUX CHAMPS.

banal qu’on se passe d’atelier à atelier. On le voit, il n’y a pas que le paysagiste qui ait intérêt à travailler et à vivre aux champs. J.-F. Millet eût-il jamais créé ses paysans d’une vie si intense, d’un sentiment si profond, s’il n’avait jamais quitté l’avenue Frochot et le boulevard ?

Quoique très-voisins de Paris, les divers centres que nous venons de mentionner ne sont pas encore à la portée de tous les jeunes artistes ; il n’est pas d’expédients que n’imagine alors un paysagiste sans argent pour prendre la clef des champs et pouvoir étudier d’après nature. Mon ami Hippolyte Noël, lui, poussa l’abnégation jusqu’à se faire cabaretier à Courville, en pleine Beauce. Je vois encore sa petite maisonnette badigeonnée en rouge, où il avait peint, selon l’usage, deux queues de billard en sautoir, galamment enrubannées. C’est là, qu’au retour de ses longues séances sur nature, il faisait sauter le lapin et marquait les « consommations », à la craie, sur l’ardoise fixée à la cheminée de la salle. Le proverbe a raison : tout chemin mène à Rome. Aujourd’hui, Hippolyte Noël s’est fait sa place parmi nos meilleurs spécialistes de la neige et nos agréables peintres de fleurs