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Page:Histoire abrégée de l'île Bourbon, 1883.djvu/21

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mais d’Orgeret sut le maîtriser par sa prudente modération. Il se montra conciliant et dévoué à tous les intérêts. La chasse fut réglementée au lieu d’être interdite ; les noirs marrons vivement poursuivis, le travail encouragé et protégé. Les habitants témoignaient leur satisfaction d’un régime qui rappelait l’excellente administration de Regnault, et la colonie aurait pu être heureuse sans les calamités qui vinrent la frapper.

14. En 1674 la colonie de Fort-Dauphin fut détruite sans retour. Quelques échappés du massacre vinrent se réfugier à Bourbon, qui leur fit l’accueil le plus empressé. Les malgaches de Bourbon pensant imiter leurs congénères, tuèrent l’officier de Sainte-Suzanne et un français ; ils n’eurent pas le temps d’aller plus loin, la révolte fut réprimée et tout rentra dans l’ordre.

On pense qu’il y eut à peine quelques victimes à Fort-Dauphin. Presque tous se sauvèrent sur le Blanc-Pignon qui se trouvait au port. Ces malheureux, au nombre desquels étaient les orphelines que la France envoyait à Bourbon, furent conduits à Mozambique, colonie portugaise. La moitié, près de 150, avait péri en route ; le reste se dissémina, partie chez les Portugais, en France, dans les Indes d’où quelques-uns seulement vinrent à Bourbon. Des seize orphelines expédiées, deux seulement parvinrent à leur destination.

À l’arrivée de ces infortunés, ce fut à qui partagerait sa case, son linge, sa nourriture, ses provisions. Les réfugiés furent si touchés de tant de cordialité que pas un ne quitta la colonie. Au reste, l’hospitalité des premiers habitants était si empressée qu’elle donna naissance à ce proverbe des vieux créoles : « qu’on pouvait faire le tour de la Colonie sans une piastre dans la poche, ni louer âne ou mulet. » [1]

  1. Notice.