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Page:Histoire des quatre fils Aymon, publication 1840.djvu/232

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car c’est moi qui ai fourni des armes contre moi, mon repentir est trop tardif. Mais Richard dit à son frère : Que ferons-nous ? puisque nous ne savons plus que faire, il faut nous rendre. Regnaut lui dit : Frère, nous rendrons-nous au plus méchant roi du monde ? mangeons plutôt non-seulement mon cheval Bayard, mais mes propres enfans en attendant quelque secours ou au moins du répit, car j’ai entendu dire qu’un jour de répit vaut beaucoup. Frère, dit Allard, je suis d’avis que nous mangions Bayard avant, qui nous a tant de fois gardés de mort. Regnaut dit : Frère, voulez-vous manger Bayard qui est le meilleur cheval du monde ? je vous prie, avant de le tuer, de m’ôter la vie à moi-même, car je ne pourrai pas voir un spectacle aussi triste ; quand vous m’aurez tué, vous pourrez tuer Bayard, et si vous ne le faites pas, je vous défendrai autant que vous m’aimerez ; ne le touchez pas, car qui mal lui fera me le fera. Quand la duchesse entendit ainsi parler Regnaut, elle ne sut que faire, et dit avec regret : Ah ! gentil duc débonnaire que ferons nos pauvres enfants ? voulez-vous qu’ils meurent de faim par faute de votre cheval ? Il y a trois jours passés qu’ils n’ont rien mangé ; il faudra donc qu’ils meurent et moi aussi, car mon cœur tombe de faiblesse ; vous me verrez mourir si vous ne me se courez. Lorsque les enfans entendirent leur mère qui parlait ainsi, ils dirent à Regnaut : Père, pour Dieu, donnez-nous votre cheval, aussi bien mourra-t-il de faim ; il vaut mieux qu’il meure que nous. Quand les frères entendirent ainsi parler leurs ne veux, Richard dit à Regnaut : Gentil duc, pour